Responsabilité des arbitres: une pluralité de fondements
Le recours croissant à l’arbitrage a mis en exergue certaines problématiques inhérentes à la responsabilité des arbitres. Bien que calquée sur le modèle des magistrats judiciaires, cette responsabilité demeure toutefois singulière. Tout comme pour ces derniers, la mission juridictionnelle des arbitres leur confère une certaine immunité, garde-fou de leur indépendance, dont les limites se dessinent en cas de « faute personnelle équipollente au dol ou constitutive d’une fraude, d’une faute lourde ou d’un déni de justice » qui engageraient alors leur responsabilité (Cass., 15 janvier 2014, n° 11-17196).
Toutefois, le particularisme de la responsabilité des arbitres a été souligné par la Cour d’appel de Paris qui a condamné solidairement des arbitres à restituer 1.116.000 d’euros d’honoraires pour avoir rendu leur sentence hors délai (CA, 31 mars 2015 n° 14/05436). Il a été considéré que cela représentait une faute dans l’exécution de leur contrat d’arbitre : le lien contractuel entre les parties faisant naître leur responsabilité contractuelle.
Ainsi, les missions juridictionnelles des arbitres sont défendues, dans une certaine mesure, au moyen de leur immunité alors que leurs missions contractuelles sont soumises au droit commun.
Le récent rapport du Club des juristes (datant de juin 2017) sur la responsabilité des arbitres envisage, quant à lui, leur responsabilité pénale, rarement engagée en pratique. En effet, au risque d’une instrumentalisation de la procédure pénale à des fins de déstabilisation, les parties peuvent engager la responsabilité pénale des arbitres en cas d’escroquerie, de corruption, de violation du secret professionnel, etc. Il s’agit, pour la plupart, d’infractions intentionnelles portant atteinte au principe de garantie du procès équitable.
Ce même rapport porte une réflexion sur la manière d’appréhender la responsabilité des arbitres et soulève la question de savoir s’il ne conviendrait pas de distinguer ce qui relève de la décision juridictionnelle de la manière dont la décision a été prise. Sur ce point, Jean-Claude Magendie estime qu’au nom de la nécessité de l’indépendance des arbitres, garantie par la protection juridictionnelle qui leur est accordée, tout doute sur la nature de l’acte mettant en cause l’arbitre, le caractère juridictionnel devrait l’emporter sur la mission contractuelle.