Attaques de drones sur les installations stratégiques d’un pétrolier Saoudien : que faire pour contrer les attaques de ces nouveaux types d’aéronefs ?
D’un point de vue juridique et en dehors de toute considération politique, le cabinet SELENE Avocats revient sur l’utilisation marquée des drones tant en matière civile que dans les conflits internationaux et les moyens dont nous disposons pour en contrer les attaques éventuelles.
Au matin du samedi 14 septembre 2019, en Arabie Saoudite, deux raffineries du groupe pétrolier saoudien Aramco ont été bombardées et endommagées lors d’une attaque de drones. Cette action a été revendiquée par les rebelles Houthis, soutenus par l’Iran, en lutte contre la coalition menée par l’Arabie Saoudite depuis 2015 pour intervenir au Yémen.
I. Une crise internationale favorisée par une utilisation croissante des drones dans les conflits armés
La suspension des opérations sur les deux sites d’Aramco, a réduit de moitié la production de pétrole de l’Arabie Saoudite, qui en constitue le premier exportateur au monde. Les conséquences sur la place internationale se sont traduites par une hausse du prix du baril et la mise en place d’un climat d’incertitude quant aux retombées économiques de cette crise ; qui se traduit notamment par le report de l’entrée en bourse d’Amraco, initialement prévue en novembre sur le marché local et en 2020 sur les marchés internationaux.
Le recours à des « drones kamikazes » par différents groupes armés s’intensifie au fil de l’évolution des conflits. Le rapport du conseil de sécurité des Nations Unies, S/ 2019/ 83, en date du 25 janvier 2019 faisait état de l’introduction dans l’arsenal Houthis de nouveaux modèles de drones, tels que le UAV-X, dotés d’un rayon d’action de plus de 1200 KM et pouvant atteindre une vitesse maximale de 250 Km/h.
Les dégâts infligés aux installations saoudiennes reflètent la difficulté, pour les autorités d’un Etat, de faire face à des attaques de drones et ce même si elles disposent des ressources nécessaires à la construction d’un système de défense perfectionné. Pour exemple, l’Arabie Saoudite avait investi plusieurs milliards de dollars dans son armement et sa protection aérienne. La défense des différents sites stratégiques (métropoles, centrales nucléaires, aéroports) de la menace des drones devient donc une priorité
II. Mise en place, par les pouvoirs publics français, de programmes permettant de détecter et neutraliser les drones non-coopératifs, tant en matière civile que militaire
En France, et il faut s’en féliciter, plusieurs actions ont déjà été prises pour garantir aux citoyens et au personnel en opération une sécurité maximale face à l’insertion des drones et ce, tant au plan civil qu’au plan militaire.
Dans le cadre du marché MILAD (Moyens Mobiles de Lutte Anti-Drones) la Direction générale de l’armement (DGA) a d’ores et déjà commandé au Groupe CS plusieurs exemplaires du système BOREADES (Détection, poursuite, brouillage, « leurrage » GPS et localisation de la télécommande des Drones Aériens). Initié en 2015, ce programme, dont les performances précises restent confidentielles, vise à protéger les zones sensibles en détectant, poursuivant et neutralisant des drones aériens non coopératifs. Concrètement, un brouillage sélectif des données de télécommande conférera à son utilisateur le contrôle du drone. De plus, une action de « leurrage » électronique des données GPS permettra de déterminer le point de récupération de l’aéronef et d’estimer la position du télépilote tout en neutralisant sa télécommande.
D’autres systèmes sont en cours de développement, tel que le programme ANGELAS (Analyse Globale et Évaluation des technologies et méthodes pour la Lutte Anti UAS), un projet de développement expérimental conduit en partenariat public-privé. Il a pour objectif de fournir une solution de détection, reconnaissance et identification des drones dans un rayon d’environ 25 kilomètres.
De tels systèmes pourront être installés autour d’installations sensibles et être déployé lors d’évènements ponctuels ou d’une certaine durée tels que les Jeux Olympiques de Paris en 2024… (29 journées en deux sessions de deux semaines, entre le 02/08/2024 au 15/09/2024 ; outre les métropolitains présents, sont prévus 2 à 3 millions de visiteurs étrangers et pour leur protection, 35 000 policiers et gendarmes, 10 000 militaires, 3 500 personnels de sécurité civile et 20 000 agents de sécurité privée. Ces contraintes sont hors norme, les Jeux Olympiques 2024 étant l’événement le plus important jamais organisé en France et une protection contre les drones malveillants est par conséquent d’ores et déjà anticipée).
Pour conclure, la « filière drones » est le reflet de l’insertion, dans notre quotidien, d’une technologie multi-usages pouvant bénéficier à l’ensemble de notre société. Mais l’utilisation parfois illégale / déviante des drones tant dans le domaine civil (cf perturbation d’un meeting de la chancelière Angela MERKEL en 2013) que dans les conflits armés, amène les pouvoirs publics à renforcer et renouveler continuellement les contre-mesures (en particulier face au développement de certains systèmes de drones automatisés, programmables à distance et parfois insensibles au brouillage GPS).