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Drones : prévention ou répression ?

Le législateur a une volonté de renforcer la sécurité de l’usage des drones civils, sans pour autant freiner le développement de la filière.

C’est dans cet esprit que s’inscrit la proposition de loi déposée en mars dernier par des sénateurs. Elle complète les arrêtés de 2015 (1) et (2) qui avaient, selon les auteurs de la proposition de loi, une visée plutôt expérimentale.

Dans un premier temps, ces sénateurs proposent de compléter l’article L. 6100-1 du code des transports, qui définit la notion d’aéronef, en ajoutant une définition du télépilote. Ce dernier aura l’usage, le contrôle et la direction de l’aéronef circulant sans personne à bord.

L’information et la formation du télépilote pour une meilleure sécurité des drones

Pour l’information du public, l’article 3 fait peser sur le fabricant du drone l’obligation d’insérer une notice informant l’usager des règles à respecter.

En vue de renforcer la sécurité du ciel (mise à mal près de Roissy à plusieurs reprises), l’article 2 de la proposition prévoit une formation obligatoire pour les télépilotes, probablement grâce à un tutoriel sur internet. La question de la vérification du suivi de la formation reste entière : faut-il s’attendre à un contrôle surprise des télépilotes ?

De plus, les drones devront emporter un dispositif de signalement électronique ou lumineux. L’objectif de l’article 4 est de distinguer rapidement les drones coopératifs des drones hostiles, afin de prévenir les situations à risque telles que les collisions avec des avions de ligne et le survol de centrales nucléaires. Cette proposition nécessite des adaptations industrielles (bridage pour certains drones), et fait donc l’objet d’un report d’entrée en application au 1er janvier 2018.

Les drones dont la masse ne dépasse pas un seuil fixé par décret, ne seront pas soumis aux obligations édictées par les articles 2 et 4.

Actuellement, le droit en vigueur sanctionne uniquement les pilotes malveillants ou négligents ; la proposition de loi étend ce dispositif de sanctions pénales aux télépilotes. L’appareil pourra alors être confisqué.

Le texte vient pour discussion devant l’Assemblée Nationale le 20 septembre prochain.

Produits concurrents et parasitisme

Le parasitisme se définit comme l’ensemble des comportements par lesquels une personne morale ou physique se place dans le sillage économique d’une autre, afin de se procurer un avantage concurrentiel sans rien dépenser de ses efforts et de son savoir-faire, sans qu’il soit nécessaire de démontrer l’existence d’un risque de confusion entre les produits et leur origine. Cela est considéré comme un acte de concurrence déloyale et sanctionné par l’allocation de dommages et intérêts au sens de l’article 1382 du code civil.
La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt rendu le 08 avril 2016 (RG n° 14/02562), a intégré dans son raisonnement la notion d’élément usuel et confirmé la décision du Tribunal de commerce de Paris en date du 20 décembre 2013.

En l’espèce, la société Séphora reprochait à la société Nocibé d’avoir lancé une gamme concurrente de produits cosmétiques pour le bain postérieurement à la sienne, avec des éléments de présentation et une identité visuelle similaires, à savoir : le conditionnement des produits, leurs couleurs, leurs senteurs ainsi que l’esprit véhiculé par la gamme dans sa présentation en rayons ou dans les publicités dans le but de se procurer un avantage économique par effet de sillage.

La Cour d’appel de Paris, pour débouter la demande de la société Séphora, a considéré que les éléments en cause susmentionnés ne pouvaient être revendiqués par cette société au motif que la gamme de produits est constituée d’éléments usuels, c’est-à-dire exploités par différentes marques dont la Société Séphora ne peut revendiquer le monopole. Ainsi, rien ne démontre en l’espèce que la société Nocibé se serait appropriée un travail spécifique créateur de valeur économique pour la société Séphora dans cette gamme de produits, pourtant condition sine qua non à l’action en concurrence déloyale par parasitisme.

Une décision sur le parasitisme conforme au droit positif

Cet arrêt s’inscrit dans la continuité du raisonnement de la Cour de cassation en la matière (Cass. Com., 4 févr. 2014, RG n° 13-10039), qui retient que pour condamner sur le fondement du parasitisme, il est nécessaire de démontrer que le défendeur se soit placé dans le sillage d’une autre société. La Cour de cassation contrôle avec attention la question du parasitisme, et souhaiterait encadrer une jurisprudence des juges du fond qui retiendraient une interprétation trop large du parasitisme, même si l’appréciation des éléments de fait établissant la réalité des investissements et de la notoriété, ainsi que la volonté de se placer dans le sillage d’une entreprise, relèvent d’une appréciation souveraine des juges du fond.

Imprévision: précisions à l’heure de la réforme

Imprévision : théorie présente dans la publication au JO

L’Ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations a été adoptée en Conseil des ministres le 10 février 2016 et entrera en vigueur le 1er octobre 2016. Si elle emprunte des concepts notamment aux droits étrangers et aux principes du droit des contrats européens, ces nouveaux textes doivent  renforcer l’attractivité du droit français. Pour autant, cette réforme perpétue, selon Geneviève Pignarre, une « philosophie libérale encadrée, telle que voulue par les premiers rédacteurs du Code civil ».

Parmi les nouveautés, certaines sont bien acceptées, telles que l’exception d’inexécution, la résolution ou bien la théorie de l’imprévision. Cette dernière théorie est un mécanisme qui a été conçu pour encourager la négociation et un recours amiable au juge, avec l’épouvantail de la résiliation judiciaire en cas d’échec des discussions.

Imprévision : nouvel article 1195 du Code civil

Selon le nouvel article 1195, « si un changement de circonstances imprévisibles lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’a pas assumé d’en assurer le risque », une partie peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant.

  • En cas d’échec des négociations, les parties peuvent, d’un commun accord :
    • résoudre le contrat, ou
    • demander au juge de procéder à son adaptation.
  • En cas d’échec des négociations, une partie peut, seule :
    • demander au juge de réviser le contrat, ou
    • demander au juge de mettre fin au contrat.

Un des effets pervers de cette disposition réside dans la survie du contrat tout au long de la négociation et jusqu’à l’issue d’une éventuelle procédure judiciaire.

A noter : cette disposition pourra être écartée par les parties, lorsque l’une d’entre elles ou les deux acceptent les risques liés à leur prestation.